CERCUEILS "INCONTROLABLES"


Article 1: Extrait de "Notre Voie" du 17 septembre 2007


Obsèques de l’ex-secrétaire général de la FESCI - Grosse frayeur à l’inhumation de Serges Kouyo à Logobia


Notre Voie - 17/9/2007


Décédé le 30 juillet 2007 dans un accident de la circulation, Jean Serges Kouyo Bogia a été inhumé samedi dernier à Logobia dans le département de Gagnoa. Mais avant, on a frôlé le pire.


Grosse frayeur samedi dernier à Logobia, dans le département de Gagnoa à l’occasion des obsèques de Jean Serges Kouyo Bogia, ancien secrétaire général de la fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), décédé le 30 juillet 2007 dans un accident de la route.

Il est 11h48mn quand prend fin, au stade du village, la cérémonie de dernier hommages à l’ex-leader de la FESCI. Une longue procession de plus d’un kilomètre s’ébranle alors vers le cimetière. Une procession essentiellement composée de militants du mouvement estudiantin à la tête de laquelle se trouve le cercueil porté par des camarades. Chants élégiaques à l’honneur du “Général terrain”, comme l’avaient surnommé les étudiants et surtout pleurs couvrent le village. Les pleurs gagnent du terrain au fur et à mesure que se réduit la distance conduisant à la dernière demeure.

Soudain, les personnes en tête de la procession rebroussent chemin en courant. “Le cercueil fait demi tour”, indique une jeune femme, le souffle saccadé. C’est la débandade dans le village. Ça court dans tous les sens. Ceux qui étaient au volant de véhicules cherchent un abri où stationner. Les pleurs deviennent rageurs pour certains et craintifs pour d’autres. “On l’avait dit, “Général terrain” a été tué par les sorciers de ce village et il refuse d’être enterré tant qu’il n’a pas désigné ses assassins”, lance un étudiant. “Ô Dieu, les sorciers de ce village ont tué le petit. Ne t’arrête pas. Va et désigne qui t’a tué”, indique une dame.

Visiblement, les porteurs du cercueil éprouvent du mal à le maintenir. Ils entrent dans une concession. Les camarades du défunt ne peuvent retenir leur indignation. Dans une fureur indescriptible, ils saccagent les trois maisons de la concession, mettent le feu à la plus grande, brisent les murs, cassent fenêtres et portes des autres. Ils mettent sens dessus dessous salons et chambres de ces maisons mais aussi une cuisine et un atelier de couture font les frais de la furie de ces jeunes.

Quelques maisons du voisinage voient leurs portes et fenêtres volés en éclats. Dans une de ces cours voisines, le feu est mis à une cuisine. Entre temps, le cercueil poursuit sa contre offensive. Sur l’itinéraire, la colère de certains manifestants s’expriment en terme d’attaque contre des maisons et d’incendie de hangars en paille. “Ne vous attaquez pas à des maisons où le cercueil n’est pas entré”, tentent de les raisonner d’autres camarades.



Le cercueil revient au point de départ



Ces derniers s’emploient à éteindre les feux allumés. Ce qui réduit considérablement l’ampleur des dégâts. Le cercueil n’entre pas dans une autre cour. Il retourne au lieu des oraisons funèbres. On l’installe au milieu du stade. On y déplace une bâche. Mais partout, les camarades de Serges Kouyo crient leur indignation. Les autorités politiques ayant effectué le déplacement reviennent sur le stade. Tout comme les leaders de la galaxie patriotique dont la plupart sont des anciens responsables de la FESCI.

Le ministre d’Etat Antoine Bohoun Bouabré, représentant le chef de l’Etat, le ministre Sébastien Dano Djédjé, fils du canton Zabia, notamment du village de Lélébrékoua, voisin de Logobia, coordinateur des obsèques, le chef de cabinet du président de la République Narcisse Kouyo Téa, le député Martin Sokouri Bohui, le député William Atteby, lui aussi ancien de la FESCI, reprennent tous place sous leur bâche.

Ils se concertent. Pour leur part, Charles Blé Goudé, Eugène Djué, Damana Pickass, Konaté Navigué, Dr. Armand Lobli, président du Comité d’organisation, Serges Koffi, actuel secrétaire général de la FESCI se réunissent. De tous ces conciliabules ressort l’idée qu’on s’adresse au défunt pour lui dire qu’on a compris son message mais qu’il permette qu’on l’accompagne se reposer.

Cette fois, à bord du corbillard. Mais avant, Serges Koffi est chargé de s’adresser à ses camarades afin qu’ils acceptent l’idée. L’électricité ayant été interrompue entre-temps le secrétaire général de la FESCI passe de bâche à bâche. Il est entendu. Nöel Kouyo, frère aîné de Serges et Eugène Djué parlent alors au défunt. Il lui demandent pardon. Après quoi, le cercueil est mis dans le corbillard et la procession reprend. Il est 13h. Il aboutit cette fois. Et à 13h30mn, le “Général terrain” se sépare définitivement de ses parents et de ses camarades. Une heure après, Logobia est vidé à 90% du monde venu pleuré Serges Kouyo.

Les autorités politiques présentes, les anciens et actuels responsables de la FESCI font le point. La concession qui a le plus subi la colère des camarades du défunt appartient à la famille Domoraud, la maison principale est celle de feu Domoraud Capri. Une des maisons est habitée par Clément Digré, instituteur à l’EPP Logobia 2. Domoraud Serges, fils du propriétaire de la maison, est grièvement blessé. Il est conduit à l’hôpital de Gagnoa. Odréko Mireille est également blessée.

Ils ont été agressés dans la cour. Toutes les familles victimes devront être dédommagées. Dernier acte, le ministre Dano Djédjé, à la tête d’une délégation comprenant Charles Blé Goudé, Damana Pickass, Eugène Djué et Konaté Navigué entreprennent une visite des domiciles touchés pour apporter leur compassion et rassurer les habitants. Chez les Domoraud, les pompiers arrivés dans le village la veille éteignent les flammes récalcitrantes.


Dan Opéli envoyé spécial

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